Attendre [Papa]

Alors que Samy bordait sa petite dernière, elle lui tendit son livre illustré. Il le prit et s'assit à côté d'elle, dans un petit sourire. L'homme savait qu'il était sujet aux caprices de la petite demoiselle, mais il n'y pouvait rien. C'était sa seule fille, et celà changeait des trois autres énergumènes qu'il avait comme fils. Non qu'il ne les aimait pas. Il les aimait comme un père aimait ses enfants, mais disons que la différence entre Melissa et les trois autres étaient... flagrantes ! Entre un petit ange et trois petits monstres insupportables !

Bien que Samy était épuisé et ne rêvait que d'aller rejoindre son lit. Car demain, il était de nouveau de boulot. Il se força à rester jusqu'au bout. Il faut dire qu'il n'avait jamais été égoïste par rapport à ses enfants et sa femme. (sauf quand il sagissait de la nourriture et de ses bagarres avec Reese, il redevenait très souvent un gosse. )

Il s'installa tout en retirant sa veste et sa cravatte. Il prit le livre et l'ouvrit. La petite avait choisit le petit poucet cette fois. Il commença son récit :

" Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous garçons; l'aîné n'avait que dix ans, et le plus jeune n'en avait que sept.

On s'étonnera que le bûcheron ait eu tant d'enfants en si peu de temps ; mais c'est que sa femme allait vite en besogne, et n'en avait pas moins de deux à la fois.

Ils étaient fort pauvres, et leurs sept enfants les incommodaient beaucoup, parce qu'aucun d'eux ne pouvait encore gagner sa vie. Ce qui les chagrinait encore, c'est que le plus jeune était fort délicat et ne disait mot : prenant pour bêtise ce qui était une marque de la bonté de son esprit. "

Samy s'arrêta un instant réprimant un large bâillement. Il cligna plusieurs fois des yeux alors. Il se reprit alors et continua :

" Il était fort petit, et, quand il vint au monde, il n'était guère plus gros que le pouce, ce qui fit qu'on l'appela le petit Poucet. Ce pauvre enfant était le souffre-douleur de la maison, et on lui donnait toujours tort. Cependant il était le plus fin et le plus avisé de tous ses frères, et, s'il parlait peu, il écoutait beaucoup. Il vint une année très fâcheuse, et la famine fut si grande que ces pauvres gens résolurent de se défaire de leurs enfants.

Un soir que ces enfants étaient couchés, et que le bûcheron était auprès du feu avec sa femme, il lui dit, le coeur serré de douleur :

- Tu vois bien que nous ne pouvons plus nourrir nos enfants; je ne saurais les voir mourir de faim devant mes yeux, et je suis résolu de les mener perdre demain au bois, ce qui sera bien aisé, car, tandis qu'ils s'amuseront à fagoter, nous n'avons qu'à nous enfuir sans qu'ils nous voient.

- Ah! s'écria la bûcheronne, pourrais-tu toi-même mener perdre tes enfants ?

Son mari avait beau lui représenter leur grande pauvreté, elle ne pouvait y consentir; elle était pauvre, mais elle était leur mère. Cependant, ayant considéré quelle douleur ce lui serait de les voir mourir de faim, elle y consentit, et alla se coucher en pleurant. Le petit Poucet ouït tout ce qu'ils dirent, car ayant entendu, de dedans son lit, qu'ils parlaient d'affaires, il s'était levé doucement et s'était glissé sous l'escabelle de son père, pour les écouter sans être vu. Il alla se recoucher et ne dormit point du reste de la nuit, songeant à ce qu'il avait à faire. "

Samy s'arrêta alors fixa la page du regard. L'homme avait oublié qu'il détestait cette histoire... Et surtout quand elle venait un soir aussi dur que celui ci. Il soupira longuement alors...

Son père continua alors l'histoire. Melissa sourit et refocalisa son regard sur le livre illustré. Elle écouta attentivement... Puis son père s'arrêta de nouveau et finit par fermer le livre d'un geste sec. Melissa leva un regard et crut capter de la tristesse. Quelque chose le rendait triste ? L'histoire peut être... C'est vrai qu'elle n'était pas très réjouissante. Melissa n'aimait pas voir son papa triste. Il allait lui dire quelque chose mais celui ci la devança en lui posant une question déconcertante. Un chien ! Melissa sourit alors, les yeux petillants de bonheur. Bien sûr que Melissa rêvait d'avoir un chien ! Comme n'importe quelle gamine de son âge qui adore les animaux.

" Ouiiiii ! "

Dit elle en sautant de ses couvertures. Mais elle remarqua que son père en aillant posé cette question, était resté triste. Comme pour le réconforter et pour le remercier de lui proposer un animal, elle l'attrapa à son cou pour lui faire un gros calin. Elle finit par lui déposer un gros bisous collant sur la joue, avant de se remettre dans ses couvertures.

Malgré le calin qu'elle lui avait fait, elle sentait que son papa était encore triste et ca la rendait triste aussi. Elle n'aimait pas le voir comme ca. Il lui dit alors de se coucher pour dormir. Il borda la petite, mais Melissa n'arrivait pas à dormir. Elle continuait de regardait son père, qui n'avait pas l'air d'aller bien. Il ferma les yeux et finit par tourner la tête, comme pour cacher son visage à son père. Melissa finit par lui tirer le bras pour attirer de nouveau son attention et l'amena à le faire allonger dans son lit. Elle lui demanda alors ton en gardant sa main dans la sienne :

" Pourquoi tu es triste papa ? "

Oui tout celà intriguait la petite dernière, qui était aussi tellement curieuse. Elle aimait son papa plus que tout, et le voir triste la rendait aussi triste. Il se demanda si c'était à cause de l'histoire du petit poucet. Elle demanda alors :

" C'est à cause de l'histoire ? C'est ca ? Je te la demanderais plus. Je veux pas que tu sois triste. "

Elle avait vraiment peur que ca soit ca... Et c'est elle qui avait proposé le livre. Elle se sentit alors un peu responsable.

Alors que Samy regardait ailleurs, il sentit Melissa tirer sur son bras. Il tourna la tête. C'est vrai qu'il avait une petite fille très intelligente ! Elle l'amena pour l'allonger. Samy se laissa faire et prit place à côté de son enfant. Elle lui tenait la main fermement comme si elle avait peur qu'il s'en aille précipitemment. Elle lui demanda pourquoi il était triste. Elle était vraiment intelligente pour son âge. Et puis, elle était sa fille, elle devait la connaitre bien. Il allait répondre quand elle demanda si c'était à cause de l'histoire. Il est vrai que Samy n'aimait pas le petit poucet mais de là à le rendre si triste. Non, c'était autre chose et il le savait. Il eut un faible sourire et répondit à l'enfant :

" Non ma petite princesse, ce n'est pas à cause de toi. Tu n'y aies pour rien. C'est juste que... On va dire que j'ai un ami qui me manque et je viens de penser à lui. Je l'ai vu il n'y a pas longtemps et il me fait la tête. C'est tout. "

Il passa une main sur son visage et repoussa une de ses mèches châtain de son visage d'enfant. Melissa avait certains traits de sa mère sur le visage, mais elle ressemblait plus à Samy, elle avait aussi hérité de ses yeux verts et de ses cheveux châtains clairs, qu'elle avait maintenant jusqu'en bas de son dos. On ne pouvait douter de son lien de parenté avec la petite. Il lui sourit doucement, et ajouta :

" Dors maintenant... Ne t'inquiètes pas ma puce... Je vais rester là s'il le faut, mais il faut que tu dormes ! "

Il repensa à l'histoire du petit poucet et faillit lui dire : " Jamais je ne t'abandonnerais. Ni toi, ni personne... " Et un pincement lui vint au coeur. Il repensa à Scooby... Ca faisait longtemps maintenant. Il était comme son frère... Et comme les parents du petit Poucet, il l'avait abandonné. Il devait le détester, et c'était normal. Il savait aussi maintenant, qu'il ne pourrait pas regagner l'amitié de son ancien compagnon si facilement. Mais Melissa avait peut être sa chance. Il espérait. Il avait fait tellement de mal à son ancien ami... Il aimerait tant réparer la faute !